Question évaluée : Le cetuximab (anti-Epidermal Growth Factor receptor) peut entraîner des hypomagnésémies et des éruptions acnéiformes +/- sévères. L’effet hypomagnésémiant des anti-EGFr peut théoriquement être accentué par la consommation d’inhibiteurs de la pompe à proton (IPP), eux-mêmes hypomagnésémiants. Le rôle de ces derniers sur la toxicité cutanée des anti-EGFr est en revanche inconnu.
Type d’étude : Rétrospective et monocentrique.
Méthode : Inclusion en 2015 et 2016 des patients traités par cetuximab pour des cancers colorectaux métastatiques (mCRC) ou de la sphère ORL. Les données ont été recueillies à partir des dossiers patients. Une analyse univariée a été réalisée, suivi d’une analyse multivariée sur les variable significatives en univariée (p<0,05).
Résultats : Un total de 118 patients ont été inclus dans l’étude (66 ORL et 57 mCRC) et 58 patients recevaient un traitement par IPP. Prises ensemble, la présence des deux toxicités était significativement plus importante chez les patients traités par IPP quel que soit le grade. Individuellement, il y avait une tendance à l’hypomagnésémie, non-significative (25,9% vs 10,4% ; p=0,08). De même, seule la survenue d’une toxicité cutanée de grade 3 ou plus était significativement plus élevée (32,8% vs. 3,3% ; p=0,001) chez les patients traités par IPP. En analyse multivariée seule la consommation d’IPP apparaissait également significative.
Points forts :
- exploration des troubles de la magnésémie dans une étude clinique en oncologie
Points faibles :
- étude rétrospective et monocentrique, certaines données sont manquantes, la présence d’une prémédication par doxycycline n’est pas précisée,
- Le mécanisme théorique d’interaction sur la toxicité cutanée est discordant avec les mécanismes mis en jeu pour les inhibiteurs de tyrosine kinase anti-EGFr,
- Pas d’informations sur la posologie et la nature des IPP (profils d’interaction différents).
Conclusion/Implications en pratique :
Il semble y avoir un lien statistique entre la consommation d’IPP et la survenue de certaines toxicités du cetuximab. Cette étude a au moins le mérite de soutenir un suivi de la magnésémie plus fréquent que cela n’est fait en pratique en oncologie (et pas que !) Le lien avec la toxicité cutanée est moins clair et devra être évalué de manière plus robuste qu’à travers une étude rétrospective, qui limite notamment la précision du grade de toxicité cutanée.
Rédigé par Thibault VALLECILLO