Démarche de deprescription conduit par les pharmaciens à destination des patients atteints de cancer en soins palliatifs

Question évaluée : Les patients pris en charge en soins palliatifs présentent un risque élevé de polymédication et de prescriptions inappropriées (PIMs) notamment compte-tenu des objectifs thérapeutiques. Cette étude vise à (i) évaluer la prévalence des PIMs chez des patients cancéreux en soins palliatifs, (ii) mesurer l’impact des interventions de déprescription menées par des pharmaciens, et (iii) comparer l’efficacité des transmissions orale et/ou écrite des interventions effectuées.

Type d’étude : Étude prospective, monocentrique, menée sur 12 semaines entre mars et juin 2023.

Méthode :Les patients inclus avaient un pronostic de survie inférieur à 6 mois. Tous les patients bénéficiaient d’une conciliation médicamenteuse à l’entrée, suivie d’une recherche systématique des PIMS à l’aide des critères OncPal et du jugement clinique du pharmacien. L’impact économique de la démarche a été estimé en tronquant le cout du médicament pour un mois et un an.

Résultats : Au total, 48 patients ont été inclus (âge moyen de 70 ± 12,8 ans) avec une moyenne de médicaments consommés de 9,4 ± 3,4. Parmi les médicaments, 113 étaient des PIMs relevés lors de la conciliation médicamenteuse à l’entrée (25,2%). La déprescription a été proposée pour 113 médicaments, 98 (86,7%) grâce avec les critères OncPal, et avec un taux d’acceptation de 71,7% (81) au total.

Autres principaux résultats :

  • Moins de médicaments à l’entrée chez les patients venant d’établissement de soins palliatifs versus l’hôpital (p=0,01),
  • L’intervention du pharmacien permettait une réduction significative du nombre de médicaments (9,4 avant 7,7; p=0,01),
  • Taux d'implantation plus élevé pour les soins de fin de vie (83,3 %) que pour les hospitalisations de répit (30%; p<0,001) et de contrôle des symptômes (65,1%; p=0,04),
  • Les IPP et anti-H2 étaient les moins déprescrits, avec 26,7% d’acceptation (p<0,01).

Résultats non significatifs :

  • Il semblait y avoir moins de médicaments prescrits chez les patients admis pour des hospitalisations de répit (n=7,7) que pour les soins de fin de vie (n=9,7; p=0,37) ou les contrôles de symptômes (n=9,2; p=0,44)
  • Il semblait y avoir plus de PIMs prescrits chez patients admis en hospitalisations de répit (n= 3,2) que pour les soins de fin de vie (n=1,4; p=0,27) ou les contrôles de symptômes (n=1,6; p=0,42)
  • Pas de différence significative dans la mise en œuvre d’une déprescription après transmission verbale ou uniquement orale (72,2% 70,6%; p>0,05)

Économies : 948 € économisés sur 28 jours pour 48 patients.

Points forts :

  • Étude en conditions réelles quantifiant le rôle du pharmacien
  • Usage combiné du guide OncoPal et expertise clinique
  • Économies réalisées quantifiables

Points faibles :

  • Taille d’échantillon restreint.
  • Utilisation de la moyenne dans un petit échantillon sans vérification de normalité, la médiane aurait pu être plus pertinente.
  • Résultats présentés comme une tendance mais ne présentant pas de significativité statistique.
  • Impact qualité de vie non évalué
  • Variabilité possible du jugement clinique pouvant introduire un biais non mesuré

Conclusion/Implications en pratique :

La déprescription auprès de patients atteints de cancer et pris en charge en soins palliatifs, menée par un pharmacien, est faisable, particulièrement bien acceptée, et économiquement pertinente. L’étude n’a pas retrouvé de différence significative quant au mode de transmission le plus adapté, que ça soit verbale ou uniquement orale. Le guide OncoPal semble particulièrement utile en appui de la démarche du pharmacien clinicien.

Rédigé par Louis GAUTIER

D’après Ciarán McAdam et al. Pharmacist-led deprescribing interventions for cancer patients in a specialist palliative care setting; Support Care Cancer 33, 321 (2025), disponible en ligne sur https://doi.org/10.1007/s00520-025-09341-9