Question évaluée :
Comparaison de la survie globale entre les patients recevant des thérapeutiques anticancéreuses conventionnelles, avec ou sans médecine complémentaire (Complementary and Alternatives Medicines, CAM), et comparaison de l’adhésion thérapeutique et des caractéristiques patients entre ces deux groupes.
Type d’étude :
Étude de cohorte observationnelle et rétrospective.
Méthode :
Inclusion des patients ayant reçu un diagnostic de cancer curable entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2013 aux États-Unis et ayant reçu au moins un traitement conventionnel anticancéreux (chimiothérapie, radiothérapie, chirurgie ou hormonothérapie). Les patients inclus dans cette étude souffraient d’un des 4 cancers les plus fréquents aux États-Unis : sein, prostate, poumon ou colorectal. Le refus de traitement était défini comme 1) le refus du patient à recevoir un traitement conventionnel (mais pas le fait d’annuler un traitement pour raisons médicales) et 2) le délai de traitement correspondant au nombre de jour entre le diagnostic de la maladie et le début du traitement.
Résultats :
Il y avait 1032 sujets dans le groupe contrôle et 258 dans le groupe CAM. Les patients du groupe CAM avaient un taux de refus de chirurgie (7% vs 0,1%), de chimiothérapie (34,1% vs 3,2%), de radiothérapie (53% vs 2,3%) et d’hormonothérapie (33,7% vs 2,8%) statistiquement plus important que le groupe contrôle. La survie globale à 5 ans dans le groupe CAM était significativement plus faible que dans le groupe contrôle (82,2% vs 86,6%), du fait notamment que les patients CAM avaient un taux de refus de traitement plus important. L’ajustement sur ce critère et sur le délai entre le diagnostic et le début de traitement supprimait la différence significative de survie.
Points forts :
- Peu d’études évaluant la survie globale moyenne vis-à-vis de la consommation de CAM,
- Évaluation quantitative du refus de thérapeutiques anticancéreuses conventionnelles,
- Grand nombre de patients inclus dans chacun des 2 bras,
Points faibles :
- Le nombre de sujets consommant des CAM est très probablement sous-estimé (sous-déclaration par les patients ou par les médecins),
- Non-prise en compte de certains facteurs pouvant influencer le taux de mortalité et ainsi biaiser les résultats : corpulence, tabagisme, revenus et niveau d’éducation, diminutions posologiques, autres comorbidités,
- Pas de stratification en fonction du type de CAM, ni vis-à-vis du risque d’interaction entre les CAM et les traitements médicamenteux conventionnels,
- L’objectif de traitement lié à la prise de CAM n’est pas renseigné et pourrait être un biais à l’analyse de la survie (amélioration de la tolérance de la thérapeutique conventionnelle, ou objectif curatif propre).
Conclusion/Implications en pratique :
Les patients utilisant une thérapeutique complémentaire ont un taux de mortalité plus élevé que ceux qui n’en utilisent pas car ils ont un plus fort taux de refus de thérapeutique conventionnelle. La place de l’approche pédagogique est essentielle, afin d’identifier ce type de consommation et les profils de patients à risque de refuser les traitements complémentaires.
Rédigé par Antoine CORNATON et Frédéric GERVAIS